Inventer et rêver la photographie
15.07.2023 - 24.09.2023
dans L'Été photographique de Lectoure, commissariat de Damarice Amao
Artiste et archéologue des pratiques analogiques de la photographie, Hanako Murakami dessine à travers ses oeuvres récentes un imaginaire sensible des débuts du médium, né dans la première partie du XIXème siècle. S'intéressant au contexte d'apparition de cette invention tant d'un point de vue technologique qu'historique, Murakami étudie et réactive des procédés anciens qu'elle transforme et détourne pour interroger ce qui constitue notre regard moderne et notre soif d'images.
Elle cherche plus particulièrement à saisir la manière dont l'idée de photographie a pu émerger dans l'esprit des premiers acteurs tel Nicéphore Niépce et Jacques-Louis Daguerre, mais aussi Louis Ducos du Hauron, à l'origine du procédé couleur intitulé trichromie, mis au point à Lectoure, et à qui l'exposition et le festival rendent également hommage. Ainsi, aux silences de l'histoire et aux manques de sources matérielles, Murakami oppose une approche spéculative. Elle invente des scénarios fictionnels qui invitent le spectateur à appréhender les imaginaires de la photographie des premiers temps selon des modalités diverses : olfactive avec l'Air de l'image inspiré du potentiel parfum du laboratoire de Niépce ; conceptuelle à travers une nomenclature recensant les noms envisagés pour désigner la photographie couleur ; ou encore sculpturale et lumineuse avec le néon indiquant "du désir du voir", extrait d'une lettre de Daguerre à Niépce ; et enfin purement photographique avec Le Champs des possibles, déclinant divers procédés mis au point par entre autres par Niépce avec plus ou moins de succès.
— Damarice Amao, commissaire invitée de l'Été photographique de Lectoure 2023, attachée de conservation au Cabinet de la photographie, Centre Pompidou, Paris
Air de l’image, parfum, 2023 Le début de la photographie était un parfum. La solution de développement pour l’héliographie était composée d’huile de lavande et d’essence de térébenthine, tandis que la solution photo-sensibilisante pour le physautotype était de l’essence de lavande ou un solide obtenu en faisant bouillir de la résine de pin. Les toutes premières images photographiques sont apparues dans un laboratoire imprégnées de ces odeurs.
impression sur voilage, 230x336cm, 2023 Le début de la photographie était dans le jardin de Niépce. Alors que la photographie n’existait pas encore, l’endroit dont il s’efforçait de capturer une image qui serait projetée au fond d’une boîte noire, était entouré par son jardin. Et un beau jour d’été la première image apparut, un rayon de soleil relia le jardin à l’extérieur et la plaque rectangulaire à l’intérieur pour faire surgir une image.
25 caractères en fonte montés sur socle en bois, 59.7 x 7 x 1.3cm Le début de la photographie en couleur était dans les mots, ou plutôt dans les termes que les inventeurs formulaient. Car l’invention de la photographie en couleur était aussi l’invention de son idée. Le souvenir du spectre, substance caméléontique ou photocopie de la lumière, les termes imaginés reflètent la notion de ces idées utopiques ensuite ouverts à tous.
25 caractères en fonte montés sur socle en bois, 59.7 x 7 x 1.3cm Le début de la photographie en couleur était dans les mots, ou plutôt dans les termes que les inventeurs formulaient. Car l’invention de la photographie en couleur était aussi l’invention de son idée. Le souvenir du spectre, substance caméléontique ou photocopie de la lumière, les termes imaginés reflètent la notion de ces idées utopiques ensuite ouverts à tous.
procédés photographiques sur papier, pierre, plaques de cuivre argenté, plaques de verre et plaques de cuivre, dimensions variés, 2022 Le début de la photographie était sur des morceaux de papier imprégnés de chlorure d’argent, ou sur des plaques argentées, ou sur des pierres calcaires polies et brillantes, couvertes de goudron de pin, ou sur des plaques argentées recouvertes de colophane, ou sur des feuilles d’argent exposées à l’iode, ou sur des plaques de cuivre chauffées, etc.
(suite) À une époque, les méthodes s’enchaînent, et certaines sont reportées sur l’expérimentation suivante. D’autres, au contraire, sont abandonnées. C’est dans ces expérimentations, perdues par la suite, que se trouve le champ des possibles.